Le divorce à l’amiable sans juge : FAQ

Depuis quelques mois, le divorce amiable sans juge a beaucoup fait parler de lui. Véritable serpent de mer juridique, plusieurs fois envisagé par les précédents ministres de la Justice mais abandonné, le divorce par consentement mutuel sans juge a fait son retour dans un amendement du gouvernement du 30 avril 2016 au projet de loi de modernisation de la justice du XXIème siècle.

Retour sous forme de Foire Aux Questions sur ce nouveau divorce et sur ce qu’il changera concrètement à partir du 1er janvier 2017.

 

  1. Tout d’abord, qu’est-ce qu’un divorce par consentement mutuel (ou divorce amiable) ?

Le divorce par consentement mutuel est un divorce où les époux s’entendent sur le principe de la séparation et sur toutes ses conséquences (partage des biens, autorité parentale, pension alimentaire, prestation compensatoire).

Ensemble avec leurs avocats, les époux rédigent une convention de divorce au sein de laquelle le divorce et ses effets sont réglés. Le couple peut aussi choisir de ne prendre qu’un seul avocat pour cette procédure (le consentement mutuel est le seul mode de divorce qui le permet).

Une fois la convention rédigée, elle doit être homologuée par le juge aux affaires familiales. Pour cela, les époux déposent une requête en divorce auprès du tribunal de grande instance et sont convoqués à une unique audience devant le juge (comparution obligatoire). Ce dernier vérifie la volonté de chacun des époux de divorcer (en les voyant séparément) et s’assure que la convention préserve les intérêts de ceux-ci et de leurs enfants s’il y en a. Si tout convient, il homologue la convention et les époux sont divorcés.

Forme de divorce la moins contentieuse et la plus rapide, elle est ainsi le plus souvent choisie par les époux qui se séparent (plus de la moitié des divorces).

 

  1. Que prévoit l’amendement du gouvernement ?

L’amendement propose une modification des articles du Code civil portant sur la procédure de divorce par consentement mutuel (les autres cas de divorces ne sont pas concernés).

Selon la nouvelle rédaction, les époux pourraient divorcer par consentement mutuel sans avoir à faire homologuer leur convention par un juge sous réserve que :

  • chacun des époux ait son propre avocat ;
  • la convention de divorce ne soit signée par les époux qu’après un délai de réflexion de 15 jours ;
  • la convention de divorce prenne la forme d’un acte contresigné par les deux avocats ;
  • la convention soit enregistrée par un notaire au rang de ses minutes pour lui donner date certaine et force exécutoire.

 

  1. Sans juge, les intérêts de chacun des époux seront-ils aussi bien préservés ?

La nouvelle procédure prévue par l’amendement remplace l’homologation du juge par plusieurs garde-fous des intérêts des époux :

  • un avocat par époux ;
  • un délai de réflexion de 15 jours avant la signature de la convention ;
  • une convention contresignée par les deux avocats.

Revenons sur chaque élément :

  • la présence impérative de deux avocats :  si aujourd’hui pour réduire le coût de la procédure et/ou parce que les époux s’entendent bien, ces derniers choisissent de ne prendre qu’un avocat pour leur divorce, l’amendement impose que chacun ait son propre avocat. Cette obligation permettrait que deux avocats soient garants ensemble de l’équilibre de la convention et des intérêts de chacun. Elle a en outre l’avantage d’éviter qu’un seul avocat n’ait à trancher des litiges entre les époux.
  • le délai de réflexion de 15 jours : il permettra d’éviter qu’une convention ne soit signée trop rapidement, chaque époux prenant ainsi le temps de réfléchir à l’acte qu’il s’apprête à signer.
  • le contreseing de chaque avocat : il est particulièrement important puisqu’en signant la convention, les avocats attestent avoir pleinement éclairé leur client sur l’acte et ses conséquences juridiques et avoir protégé leurs intérêts. La signature des avocats engage leur responsabilité.

 

  1. Cette procédure s’appliquera-t-elle en présence d’enfants mineurs ?

Dans la version actuelle de l’amendement, le divorce par consentement mutuel sans juge sera possible quand bien même les époux ont des enfants mineurs. Toutefois, l’ancienne procédure (homologation de la convention par le juge) sera applicable si l’un des enfants du couple, informé de son droit à être entendu par le tribunal, demande son audition.

C’est aujourd’hui la partie de l’amendement du gouvernement qui soulève le plus de questions et d’oppositions, ses opposants reprochant de ne pas assez prendre en compte l’intérêt des enfants (seront-ils bien informés de leur droit par leurs parents ?) et mettant en avant un risque d’instrumentalisation à leur encontre. Nombreux sont ceux qui préfèreraient ainsi que la nouvelle procédure du divorce par consentement mutuel ne soit pas envisageable en présence d’enfants mineurs ou proposent que, dans cette hypothèse, les dispositions prévues par la convention à leur sujet soient indépendamment homologuées par le juge.

Les prochaines lectures du projet de loi devant le Sénat et l’Assemblée Nationale (voir calendrier question 10) reviendront certainement sur cette question et pourraient modifier la procédure en présence d’enfants mineurs.

 

  1. Quel sera le rôle du notaire ? Vérifiera-t-il la convention de divorce ?

Le rôle du notaire ne sera que de constater le divorce et d’enregistrer la convention pour lui conférer une date certaine et force exécutoire. Sa mission ne consistera pas à conseiller les époux, à procéder à un contrôle de l’équilibre des intérêts de chacun ou à modifier la convention de divorce.

En revanche, le notaire vérifiera la validité de la convention au regard des exigences formelles indiquées dans les nouvelles dispositions du Code civil (identité des parties, mention de l’accord des époux sur le divorce et ses effets, présence d’un état liquidatif si nécessaire, etc). Il s’assurera également que le projet de convention n’a pas été signé avant l’expiration du délai de réflexion de 15 jours.

 

  1. Si les époux habitent à l’étranger, pourront-ils faire enregistrer leur convention par l’ambassade ou le consulat ?

Les ambassades et les consulats peuvent effectivement agir tels des notaires et établir des actes revêtus de la force exécutoire (procuration, contrat de mariage, testaments). Toutefois à ce jour, nous ne pouvons pas dire avec certitude si les Consuls de France à l’étranger pourront enregistrer les conventions de divorce. Si ce n’est pas le cas, il faudra se rendre en France pour demander à un notaire français d’enregistrer l’acte rédigé.

 

  1. Ce divorce sera-t-il plus rapide ?

Cela dépend.

On pourrait tout d’abord le croire en raison de la suppression de l’audience devant le juge. En effet, les délais pour obtenir une date d’audience, variables selon les régions, sont en général de quelques mois (par exemple à Paris 2 mois, à Pau 3 mois). Si un tel amendement devait donc être accepté, les époux gagneraient théoriquement quelques mois.

Toutefois dans les faits, ce ne sont pas les délais d’audience qui allongent la durée de la procédure. Cette durée dépend surtout des biens que le couple possède (s’il faut les partager), des enfants (quels sont les modalités de résidence, le montant de la pension alimentaire), du nombre d’année de mariage (négociation d’une prestation compensatoire). Qu’il y ait un unique avocat et un juge ou deux avocats sans juge, les discussions sur ces éléments sont fondamentales et peuvent prendre du temps.

Donc oui, si les époux divorcent sans bien ni enfant, la nouvelle procédure sera plus rapide. Un divorce en 15 jours, tel qu’annoncé dans les médias, paraît toutefois légèrement illusoire sachant que les époux devront tout de même rédiger une convention de divorce.

 

  1. Ce divorce sera-t-il moins cher ?

Non.

On a parfois entendu qu’il allait être possible de divorcer pour 50 euros.  Le calcul est ici trop rapide.

En effet, la nouvelle procédure nécessitant impérativement que chacun des époux ait un avocat, il faudra systématiquement verser des honoraires à deux avocats (alors qu’aujourd’hui le couple peut économiser en frais d’avocats en choisissant un unique conseil pour leur divorce).

En outre, alors qu’aujourd’hui le juge homologue les conventions de divorce gratuitement, l’amendement prévoit que l’enregistrement des conventions par les notaires soient facturés 50 euros.

Le divorce sans juge ne sera donc pas moins cher.

 

  1. Sera-t-il quand même possible de divorcer selon la procédure antérieure (à savoir un seul avocat et une homologation du juge) ?

Non.

Le divorce non homologué par le juge, avec deux avocats et un enregistrement par un notaire sera le seul divorce par consentement mutuel possible (sauf présence d’enfants demandant à être entendus).

 

  1. Est-il déjà possible de divorcer sans juge en France ?

Non, pas avant le 1er janvier 2017, date à partir de laquelle la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle adoptée par l’Assemblée Nationale et le Sénat doit entrer en vigueur.

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